Depuis
le début du mois de juin, le Togo est secoué par une vague inédite de
contestation socio-politique, impulsée non pas par les acteurs
politiques traditionnels, mais par un collectif informel de la diaspora :
le M66. Ce mouvement, qui rassemble blogueurs, influenceurs, artistes
et activistes, a choisi TikTok comme terrain de mobilisation et
d’expression, attirant chaque jour des milliers de spectateurs autour de
leurs lives à forte audience.
Au
cœur de cette dynamique contestataire, une figure se détache : Konou
Dotse Emefa, plus connu sous le pseudonyme de Roméo Mokonzi. Exilé en
France depuis 2022, cet ancien animateur et militant numérique s’était
déjà illustré en 2020 par ses prises de parole virulentes à l’encontre
du régime de Faure Gnassingbé, dénonçant sans relâche la gouvernance
autoritaire, la précarité généralisée et l’absence de perspectives pour
la jeunesse togolaise. À l’époque déjà, ses critiques lui avaient valu
des menaces directes, renforçant sa posture d’opposant engagé.
Aujourd’hui,
Roméo Mokonzi revient au premier plan, cette fois comme l’un des
piliers du M66. Aux côtés de Zaga Bambo, Kodjovi Toguin, et Togbevi
Kpessé, il fait partie des voix les plus écoutées de cette fronde
numérique devenue populaire. Ensemble, ils dénoncent la vie chère, la
répression, la confiscation des libertés et appellent ouvertement au
départ du président Faure Gnassingbé, au pouvoir depuis 2005.
Si
le M66 n’est affilié à aucun parti politique connu, ses membres
revendiquent une légitimité citoyenne et se présentent comme les
porte-voix d’un peuple togolais lassé, frustré et désabusé. Le choix de
TikTok, loin d’être anodin, leur permet de toucher une population jeune,
connectée, avide de discours nouveaux et de perspectives alternatives.
En
l’espace de quelques semaines, le mouvement a réussi à faire descendre
dans les rues plusieurs centaines de manifestants, à Lomé comme dans
d’autres villes, malgré une forte surveillance et des risques de
répression. Bien que basés à l’étranger, les leaders du M66 semblent
avoir trouvé le ton et les moyens pour raviver la flamme d’une
contestation sociale que beaucoup croyaient étouffée.
Roméo
Mokonzi, par sa constance, son charisme et sa parole libre, est
aujourd’hui vu par de nombreux jeunes comme l’un des symboles d’un
espoir retrouvé, celui d’un Togo libéré de décennies d’autoritarisme.
Reste à savoir jusqu’où ira ce mouvement et s’il parviendra à faire
trembler durablement les fondations d’un régime solidement ancré depuis
plus d’un demi-siècle.
Un
engagement sous haute menace. La voix de Roméo Mokonzi dérange, au
point d’attirer sur lui et ses compagnons la foudre du régime. Menaces
ouvertes, rumeurs de primes placées sur leurs têtes, tentatives de
déstabilisation… À Lomé, ce sont leurs proches qui en subissent les
conséquences : intimidations répétées, pressions psychologiques, climat
de peur entretenu autour de leurs familles. Mais loin de les faire
reculer, ces méthodes ne font qu’alimenter leur détermination à
poursuivre le combat.
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